La Tristesse, la Solitude, et la Rose Noire.

Clac. Clac. Clac. Clac.

Un bruit sec de talons hauts résonnait dans la bâtisse. Écho clair et sans prétention de grandeur. Ses pas, espacés dans le temps, montraient son engouement -très mince- à exécuter sa mission. Elle prenait son temps. Elle prenait ses aises. Tranquille. Elle se savait sans menaces, sans ennemis, seule. Ou du moins dans son monde, elle l’était. Dans la réalité, des dizaines de personnes se trouvaient aux alentours. Un contraste étonnant. Les couloirs s’enchainaient interminables. Les petits jardins, les belles statues, et autres décorations se succédaient harmonieusement, tandis qu’elle et son serviteur traversaient les différentes églises, toutes donnant une raison de plus à la Noah de trainer en besogne comme elle savait si bien le faire. Il y avait de l’art, de la beauté et de l’amour dans ces édifices et Svetlana n'y était pas insensible. Donc elle s’y attardait, touchant délicatement la surface des œuvres de marbres, et de matériaux précieux, s’imprégnant du calme et de la sérénité des lieux. Bien entendu, le travail serait fait proprement et entièrement comme d’habitude, le Comte n'avait pas à s'inquiéter, mais inutile d’être hâtif. Il n’y avait personne non? Ne se montrait même pas, un de ces maudits prêtres venu pour soi-disant purifier son âme. Pas de messe le Vendredi, c'était comme ça. Tous devaient être au presbytère en ce moment. Hnn, ils étaient drôles ces vieux bonshommes. Ils se croyaient messagers de dieu et avaient foi en lui plus qu’en toute autre chose. Mais qu’est-ce que ce dieu pouvait en avoir à faire de leurs existences ? Valaient-elles assez à ses yeux pour qu’il leur épargne la mort ? Probablement que non, ou la Noah le saurait depuis bien longtemps…pour le nombre d’entre eux qu’elle avait déjà fait passer de vie à trépas. Il était divertissant de défier effrontément dieu en tuant ses larbins. De voir ceux-ci se détourner de lui, complètement perdus dans leurs sentiments d'abandon et de solitude. Aucune fois quelconque ne leurs apportant de réconfort. Dommage tout de même qu’il n’y ait jamais eu de représailles, cela en devenait presque décevant de la part du "Tout puissant". Même en ce qui concernait les différents conflits dans le monde, les innocents qui mourraient par milliers, il ne faisait rien. Peut-être voulait-il laisser les hommes à leurs enfantillages? Les laisser seuls? Abandonnés. Si oui, c’était alors l'un des plus beaux cadeaux qu'il puisse lui faire. Lui offrir une source de pouvoir quasiment inépuisable.

« Seule. Si seule. » Souffla une voix désincarnée dans le vent, presque inaubile.

Souriant comme une enfant à la vue d’un minuscule oiseau voletant gaiement atour de sa personne, la Noah d’un geste vif sans brutalité, emprisonna cette joie de vivre qui caractérisait la créature. Et c’est sans émotion qu’elle l’éradiqua purement et simplement. La matière noire sur une si petite chose. Que cela pouvait-il bien donner. Un monstre, une arme, ou un cadavre de plus à ajouter à la longue liste dont pouvait se vanter Svetlana de par son jeune âge ? Mais qui pouvait se vanter d’avoir tué un oiseau. C’était d’un ridicule. Il était toutefois moins ridicule de posséder désormais un petit espion à sa disposition. Qu’il était utile de pouvoir pénétrer l’esprit des êtres vivant et d’en prendre le contrôle…

« Enfant, que fais-tu toute seule?» une autre voix, plus dur, tranchante, siffla à ses oreilles, la faisant chercher sa provenance. En vain. Etrange. Fronçant les sourcils, elle nota ce phénomène dans sa tête et retourna à ses affaires.

Il fallait faire attention, prendre ses précautions. Le nombre de connexions mentales de la Noah étaient monté à deux. Ce n’était pour l’instant pas éreintant vu la taille et la maturité des esprits condamnés, mais ce n’était pas négligeable non plus. D’ailleurs la jeune femme, très stricte avec son pouvoir, jeta un coup d’œil perçant au gamin sans vie propre. Réévaluant une fois de plus ses capacités, elle décida tout de même de le garder. Pour une surprise. Agréable ou pas, ce serait à vous ‘en juger. Aussi, gracieuse, Svet’ leva sa main servant de perchoir, et une petite caresse posée sur sa tête, un petit mot susurré à l’oreille et ça y était le petit volatile était partit. On, ne savait où. Ou du moins vous ne le saviez pas. La Russe, elle, si.

«Toujours aussi seule.» ajouta une autre de façon très douce. Un souffle, un murmure, perçu par l'esprit de la Noah comme une griffure.

-La Ferme ! Avait sifflé la jeune femme, peu encline à se faire rappeler sa condition.

Cela faisait la troisième fois qu’elles les entendaient. Ces voix. Au départ, elle avait cru que ce n’était que le fruit de son imagination, mais elles se faisaient de plus en plus fortes, et une désagréable démangeaison lui martyrisait l’oreille chaque fois qu’elle les entendait. Innocence? Pourquoi pas...mais alors pourquoi trois voix et pas une seule? Y avait-il trois innocences ?




Toujours assurer ses arrières, avoir un coup d’avance et se préparer à toute éventualité. Quelques-unes des nombreuses choses que la vie de Noah lui avait apprises. Mais qu’apparemment l’on négligeait d’enseigner aux prêtres. Pour leur propre survie, c’était regrettable qu'il l'ignore. Surtout pour celui actuellement étalé à ses pieds, baignant dans son sang. Il aurait puent jouer un peu plus longtemps. Bien qu'elle commença à trouver le temps un peu longs.

-Tu as très bien fait Nikita. Je te remercie.

Assise sur une espèce de trône ouvragé, rehaussé d’or et de joyaux, avec à ses pieds son esclave blond, la jeune femme jouait négligemment avec sa chevelure, pensive. Les pieds posés sur le cadavre de l’homme d’Eglise, la jeune femme réfléchissait à ce qu’elle avait vu dans l’esprit de celui-ci. Rien de bien précis concernant une quelconque manifestation de l’innocence. Tout était confus dans cette partie de son esprit. Il n'y avait qu'un brouillard blanc et quelques sons. Lui avait-on fait un lavage de cerveau? Pourquoi pas? Même si c'était peu probable. Pourquoi lui aurait-on fait cela? Sa venue avait-elle été découverte et le pauvre homme mis en condition pour la recevoir sans laisser filtrer quoi que ce soit...au péril de sa vie? Peut-être. C'était trop de questions pour quelque chose d'aussi simple qu'une petite chasse à l'innocence.


FLASH BACK.


Ils progressaient en silence. Lentement mais surement. Prenant leur temps pour admirer les trésors de beauté calme que le Monastère avait à leur offrir. Tout en ne perdant pas de vu sa mission, Svetlana tentait de se changer les idées. Oublier sa solitude. Bien qu'elle sache que cela soit impossible. Au moins, tentait-elle de profiter des jardins et du ciel bleu. Maigre consolation. Mais une consolation tout de même. Jetant un regard circulaire autour d'elle, celui-ci tombe sur son petit soldat. Elle sourit.

Nikita. Le garçon qu’elle avait lobotomisé. Il l’a suivait comme un chien avec son maitre. C’était bien ça. La solitude envoyait les humains à a recherche de quelqu’un à qui se lier. Dans son cas, Nikita avait trouvé Svetlana, et ne la quittait plus. Cela aurait pu parait bien beau si ce n’était pas Svetlana qui avait créé cette dépendance. Mais quelle importance. Le Noah ne recherchait que de l’utile pour le moment. Et utile, ce gamin allait l’être.

- Mène-moi au presbytère. J’ai envie de discuter avec nos chers moines..

Et ils reprirent leur cheminement à travers le complexe ecclésiastique. De loin, en faisant abstraction de la peau gris de Svet' on aurait pu les prendre pour un frère et sa sœur, ou une jeune mère et son fils. Peut-être était-ce cette innocente apparence qui scella le destin de notre pauvre macchabé. Qui lorsqu’il les vit du haut de son étage, leur cria, se penchant à la fenêtre:

-Madame, que faites-vous ici ? Cet endroit est interdit au…

Le regard or de la Noé, tranchant, pénétra les différentes couches d’un esprit pollué par une foi en un dieu honni à la recherche d’une seule information. Innocence où te caches-tu ? Après quelques minute, le visage féminin pris un air déçu. Elle n’avait pas pensé que ce serait si compliqué. Elle aurait besoin d’aide. Pour la recherche principalement. Elle n’allait pas continuer à se promener éternellement dans les églises au risque de se perdre. Et l’innocence ne se laisserait pas prendre aussi facilement.

-NOAAAAH !

Svetlana sursauta au cri d’horreur et à l'alarme bruyante qui perça l’air. Première pensée : « Oui et alors ? ». Deuxième pensée. « Qu’on me débarrasse de ça. » Ce qui fut fait immédiatement. Son petit russe asservi pénétra le presbytère à toute vitesse, trouva la chambre de l’évêque, le combattit quelques instants, puis mis fin à ses jours de façon nette et précise. Enfin le silence reprenait ses droits. Apparaissant là où s’était trouvé l’homme un peu plus tôt, il interpela la Noah d’une voix monocorde. Il avait trouvé quelque chose...Une clé. Une clé que le prêtre gardait sur lui. n or. Précieuse.


FIN FLASH BACK.


Elle fouillait, trifouillait, farfouillait dans la chambre simple du prêtre, parmi ses affaires personnelles et administratives. Pour trouver quoi? Un coffre. Ou quelque chose pouvant être ouverte par cette putain de clé Mais rien. Absolument rien. Pourtant elle la sentait. Ce picotement désagréable dû à la présence de l’innocence pas loin. était omniprésent. Et ce depuis qu’elle était entrée profondément dans le monastère. Il augmentait où diminuait selon les endroits, mais elle ne voyait jamais rien. Et puis les voix. D’où venaient-elles ?! Fallait-il qu’elle détruise entièrement la bâtisse, qu'elle mette tout à nu pour découvrir ce qu'elle cherchait? Ce serait dommage non ? Donnant un coup de pied rageur dans le corps mou et flasque de son premier mort de la journée, la russe sortit de la pièce qui commençait à la rendre nauséeuse. Elle détestait être enfermée avec des morts, seule surtout. Cela lui donnait des frissons. La mort et la solitude, deux choses extrêmement liées...qu'elle haïssait ou aimait passionnément selon les moment. De la mort résultait un sentiment de solitude. On nait seul, on meure seul. t de la solitude pouvait résulter la mort. Un suicide.

-Nikita ? Qu’en penses-tu toi ? Devrais-je tout raser ou continuer à chercher tranquillement?

Demander son avis à un enfant. Quelle idée. Il ne savait surement même pas de quoi elle parlait. Et comme elle s’y attendait, l’enfant ne put que lui répondre de sa voix éteinte :

-Je ne sais pas.

Rien d'étonnant. Il n’avait plus de pensée propre. Son esprit était contrôlé par la Solitude. Elle se posait donc la question à elle-même ? Et ce maudis prêtre qui ne savait strictement rien. Qui d’autre aurait pu lui donner la réponse à sa question si ce n’était lui. Arghh ! Il fallait qu’elle réfléchisse comme elle savait si bien le faire. Qu’elle était l’histoire de ce monastère. Qu’avait-il de particulier pour qu’une -ou que des- innocences s’y cachent. Surtout avec une capacité de communication comme celle-ci. Communiquer avec les êtres humains n'était pas donné à tous ces morceaux du cube...


A l'extérieur, au bout de l'avenue Staronevski, un petit oiseau gris au regard vif se posait innocemment sur la plus haut branche d'un arbre, fixant de ses yeux ronds comme des billes, deux petites silhouettes situées juste devant l'entrée du Monastère Alexandre-Nevski. Une aux cheveux bleus, l'autre à la chevelure noire. Tout à fait innocemment, il poussa un petit cri et s'en alla, quelques seconde à peine après s'être posé, il n'était plus là.